Chiour par Mr Le Rabbin Daniel GOTTLIEB |
«LES FETES DU MOIS
DE TICHRI
LA JOIE. »
LES FETES DU MOIS DE TICHRI
LA JOIE
Lorsqu'on aborde le mois de Tichri, on ne pense habituellement
qu'aux « grandes solennités »,
aux « fêtes austères »,
qui le caractérisent : Roch Hachana et Yom Kippour. On a
ainsi l'impression que l'année juive commence par une période
empreinte de gravité et de pesanteur.
Et quand bien même, dès le lendemain de Kippour,
on se prépare à célébrer la fête de
Soukkot, on n'aperçoit pas toujours le lien qui unit Kippour
à Soukkot : on se contente trop souvent de dire que la construction
de la Soukka constitue la première mitsva exceptionnelle qui s'offre
à nous après la « réconciliation
», l'absolution que procure le «
Jour du Grand Pardon ».
Trop souvent on considère aussi que Soukkot appartient au groupe
des fêtes de pèlerinage, sans rapport avec les premières
fêtes du mois de Tichri, fêtes dites austères.
Cette conception simpliste ne permet pas de percevoir l'unité que présente le mois de Tichri, dans la progression qu'établissent les trois solennités qui s'y déroulent. II semble donc important de considérer le mois de Tichri dans son ensemble pour découvrir la leçon générale que la Tradition veut nous porter au début de l'année religieuse.
ROCH HACHANA.
- La sonnerie du Chofar est la seule mitsva concrète pour le 1er Tichri. Le son élémentaire, inarticulé, qui retentit dans le silence recueilli de la synagogue. provoque en chacun une émotion ardente, indicible. II serait sans doute difficile d'exprimer les contenus de cette émotion. II n'est pas même nécessaire d'évoquer, sur un plan intellectuel, les significations véhiculées par le son du Chofar pour sentir vibrer, intensément, la corde sensible du sentiment religieux qui se trouve en notre cœur. Chacun réagit à ces sonneries de façon personnelle chacun en fonction de ses connaissances, de ses expériences, de sa sensibilité. Tel est sans doute le premier objectif du Chofar : réveiller en nous le sentiment, la sensation de notre appartenance au judaïsme, à son destin et à sa culture, dans ses aspects à la fois communautaire et religieux.
YOM KIPPOUR
est une journée qui se caractérise par le jeûne
et la prière. Mais cette prière ne consiste pas tant en la
formulation de souhaits ou de requêtes. En fait, la mitsva essentielle
qui concrétise la démarche de la Techouva nécessaire
à l'obtention du pardon de Kippour se situe au niveau de la parole
: elle trouve son expression la plus évidente dans la confession
des fautes. II va de soi que cette confession ne saurait se limiter à
la récitation liturgique du «
Viddouy » ; elle implique non seulement un examen de conscience
mais surtout un bilan de comportement, sincère et détaillé.
La particularité de cette analyse, à laquelle Kippour
invite chacun de nous, est qu'elle doit se manifester sous la forme verbale
de la confession. II semble inutile d'ajouter que pour juger ses propres
comportements, pour savoir ceux qui doivent
être confessés et amendés, il est indispensable
de connaître les critères objectifs du bien et du mal, tels
qu'il sont définis par la tradition juive : le jour de Kippour est
trop sérieux pour qu'on ose s'y réfugier dans le confort
moral de la « bonne conscience ».
Ainsi, si Roch Hachana a agi sur notre sentiments, les « dix
jours de pénitence » nous amènent à Yom Kippour,
qui doit avoir de l’effet sur notre engagement intellectuel - ce dernier
trouvant son expression dans la parole, dans l'usage que nous faisons de
la parole.
SOUKKOT.
- Les mitsvot qui marquent la célébration de la fête
de Soukkot sont apparemment d'un tout autre ordre : c'est le Loulav que
l'on prend dans ses mains, et c'est la Soukka dans laquelle on pénètre,
comme pour être entouré, « enveloppé »
dans la mitsva. Les mitsvot de Soukkot sont essentiellement gestuelles,
rituelles.
De sorte que les trois fêtes du mois de Tichri, qui ne
doivent pas être dissociées les unes des autres, constituent
les grandes étapes d'un processus dont la progression illustre la
spécificité du judaïsme, tel qu'il devrait être
incarné tout au long de l'année qui commence : ROCH
HACHANA. KIPPOUR, SOUKKOT.
Le sentiment et la pensée, la parole et l'action : ces trois éléments forment un ensemble, ils apportent la substance globale de ce qui doit nous animer, en permanence.
II ne suffit pas d'avoir un cœur juif. II faut aussi acquérir les connaissances qui habilitent à parler, légitimement et à bon escient, au nom du judaïsme et de ses espérances ultimes. Et si, ensuite, on en vient naturellement à vouloir agir selon les normes juives, on ne verra ni légalisme formel, ni contraintes dans l'observance des mitsvot : la pratique des mitsvot sera au contraire source de satisfactions et de joies. C'est ainsi que la fête de Soukkot est « zeman sim'haténou », « le temps de notre joie » - joie spécifique, « sim'ha chel mitsva », joie religieuse, qui trouve son apothéose le jour de Sim'hat Tora, tout entier consacré à la joie de la Tora.
Le mois de Tichri n'est que le premier mois de l'année : qu'il
donne une impulsion bénéfique à l'année qui
le suit.
Ce serait un gage de sincérité, d'authenticité,
de développement, de progrès et de réussite pour la
vie de chacun de nous comme pour la vie de communauté.
Tel est le voeu que je formule en cette veille d’un an nouveau.
Samson Raphaël Hirsch illustre ce thème de la joie en constant que la Tora prescrit :
« Tu célébreras la fête de soukkot pendant sept jours... » (Lév. XXIII, 34)
Roch Hachana et Yom Kippour qui
sont des jours graves, austères, où il est légitime
de se sentir un cœur brisé par le jeûne et la gravité
des suppliques que l’on adresse à Dieu, ne durent respectivement
qu’un jour ou deux.
Mais la fête de soukkot, qui est Zemane
Sim’haténou, le temps de notre joie, dure sept jours,
parce que la volonté de Dieu est qu’Israël Le serve toujours
dans la joie comme il est écrit (Psaume
100, 2) :
"Servez Dieu dans la joie … "
Et le fait de n'avoir pas servi Dieu dans la joie, avec joie, et dans
le bien être est considéré comme une grave faute
(Deut. XXVIII, 47).
Le judaïsme recherche et prône la joie.
(S.-R. Hirsch cité dans Ittouré
Tora)
Le Rabbin Daniel GOTTLIEB
A suivre .....
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