Chiour par Mr Le Rabbin Daniel GOTTLIEB |
«L'exemption de la Souccah. »
MITSTAER PATOUR
L'exemption de la Souccah
"La prescription biblique" concernant la Souccah consiste
à y prendre ses repas, à y dormir à y recevoir ses
amis car la Souccah remplacera en toutes choses la résidence habituelle,
pendant sept jours...
Le devoir de coucher dans la Souccah est strict de sorte qu'une Souccah
faite de manière qu'il soit impossible d'y coucher ne serait pas
valable. Cependant si la Souccah se prêtait initialement à
cet usage, mais que par suite d'une circonstance indépendante de
la Souccah (par exemple des intempéries), elle ne puisse plus répondre
à cette utilisation, elle reste néanmoins valable...
En effet, "non seulement les malades, mais aussi les personnes qui
se trouvent incommodées ou génées par l'accomplissement
de la Mitsvah de la Souccah en sont dispensées." : Mitstaer
Patour.
(Choul'han Aroukh abrégé, p.601)
La disposition qui prévoit qu'une personne incommodée par l'accomplissement de la Mitsvah de la Souccah, en soit dispensée, est extrêmement surprenante : elle n'apparaît en effet qu'à propos de Souccoth, alors que toutes les autres prescriptions bibliques ne laissent en général place à aucune dérogation pour convenances personnelles.
Comment faut-il donc comprendre cette exemption pour les personnes qui seraient incommodées ?.
De façon très concrète, la règle stipule que s'il pleut au point que les gouttent de pluie tombent dans les assiettes jusqu'a rendre les aliments qui s'y trouvent peu appétissants, on est autorisé à ne pas se rendre dans la Souccah pour y prendre son repas, et on est autorisé à la quitter si on s'y trouve.
Cette précision indique les critères objectifs qui dispensent de la Mitsvah de la Souccah (le froid n'en fait pas partie dans la mesure où il est toujours possible de se couvrir pour n'être pas incommodé par le froid durant le temps d'un repas). Mais elle ne justifie pas le principe même de l'exemption.
On ne peut la comprendre qu'en tenant compte du caractère très particulier de la Mitsvah de la Souccah.
En effet, le premier jour de la fête de Souccoth, est désigné simplement dans la Bible comme le "premier jour" (et non comme le 14ème jour [du mois de Tichri], ce que les commentateurs expliquent en disant que Souccoth est le début d'un nouveau bilan après la réconciliation avec Dieu, qui s'est opérée à Yom Kippour). La Mitsvah de la Souccah est donc la première Mitsvah exceptionnelle qui se présente au lendemain de Yom Kippour. Qu'il pleuve au point de rendre le séjour dans la Souccah insupportable et l'on sera évidemment en droit de la quitter pour retourner dans la demeure habituelle.
Mais dans une telle situation deux attitudes sont possibles :
* Dans la première, celui qui verra tomber la pluie
pourrait se réjouir ou du moins se consoler de ne pouvoir rester
dans la Souccah, en pensant au confort qu'il trouvera dans son appartement
spacieux, chaud et douillet; avec la bonne conscience qu'il croira trouver
dans les conditions climatiques défavorables. Il se considérera
comme réellement dispensé de la Mitsvah de la Souccah.
* La seconde attitude possible est toute différente.
Celui qui depuis l'issue de Kippour se sera adonné avec empressement
à préparer la célébration de la fête
de Souccoth - première Mitsvah exceptionnelle après la réconciliation
avec Dieu le jour de Kippour -, sera affligé à l'idée
de ne pouvoir réaliser le projet qu'il avait si ardemment conçu.
Tout semble se passer comme si Dieu refusait l'offrande de la Mitsvah.
Le Talmud illustre cette situation par une parabole : un serviteur apporte
une carafe d'eau à son Maître qu'il aime pour lui permettre
d'étancher sa soif, mais le maître renverse la carafe sur
son serviteur, dont on ne peut alors imaginer la peine.
Celle d'un homme qui se réjouissait d'offrir un cadeau
préparé avec soin et qui voit son cadeau brutalement dédaigné.
Celui qui ressent la même peine à l'idée de ne pouvoir
célébrer Souccoth - et celui-là seulement -, sera
considéré comme dispensé de la Souccah. L'autre, qui
n'a pas les mêmes scrupules sera considéré comme ayant
tout simplement négligé l'accomplissement d'une belle Mitsvah,
facile et cependant importante.
De façon concrète, on pourrait illustrer cette idée
par un aspect de la Mitsvah de la Souccah.
Comme on l'a rappelé en exergue, le devoir de dormir dans la
Souccah est formel. Mais les décisionnaires ayant vécu dans
des pays froids d'Europe ont estimé que les conditions climatiques
de ces régions ne permettaient pas de dormir dans la Souccah sans
que cela comporte de sérieux risques pour la santé. Au point
que "dans nos régions" on ne pratique guère cette partie
de la Mitsvah de la Souccah. Ceux qui ne la connaissaient pas pêchaient
par ignorance, sans doute, mais n'étaient pas dispensés de
la Mitsvah de la Souccah sous tous ses aspects. Ceux qui savaient qu'il
fallait dormir dans la Souccah mais acceptaient allègrement d'aller
dormir dans le lit confortable de leur chambre à coucher, pouvaient
se considérer en règle au regard de la stricte Loi, mais
ils pêchaient par omission ou par négligence au même
titre qu'une personne qui n'écouterait pas le Chofar à Roch
Hachanah ou qui ne mangerait pas de la Matsah à Pessa'h. En revanche
celui qui est MITSTAER, c'est à dire affligé de ne pouvoir
accomplir la Mitsvah de la Souccah dans toute sa plénitude - celui
qui souffre non seulement du froid mais surtout d'habiter un pays d'exil
où l'observance de la Loi est compromise, ne serait-ce qu'à
cause du climat -, celui-là et celui-là seulement est considéré
comme dispensé du devoir de dormir dans la Souccah.
"MITSTAER PATOUR" : ainsi, l'exemption
ne découle que du sentiment de frustration que l'on éprouve
à l'idée de ne pouvoir accomplir intégralement la
Mitsvah de la Souccah.
.Le Rabbin Daniel GOTTLIEB
A suivre .....
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