Haazinou
Le respect dû aux Sages
« … Interroge ton père, il te l’apprendra,
tes aïeux, ils te le diront » (Devarim 32 : 7).
En commentant le verset « Vas et
rassemble les anciens d’Israël » (Chemot 3 :16), nos Sages précisent
que ce sont les anciens qui soutiennent véritablement le peuple et c’est
en dispensant des avis autorisés que nos anciens, les Sages d’Israël,
maintiennent la pérennité de la nation.
Quand est-ce que les enfants d’Israël
résistent à toutes les épreuves ? demandent nos Sages « Quand ils ont
des Anciens ».
Le Midrach dit que l’on peut comparer
les enfants d’Israël à des oiseaux, et cela, en ce qu’un oiseau ne
peut voler sans ailes, de même un Juif ne peut rien sans les conseils
dispensés par les Anciens (Midrach Raba Vayikra 11 : 8).
Le Tiferet Israël explique que
croire tout ce que l’on entend est pure folie, toutefois, s’agissant
des Sages, on se doit de croire tout ce qu’ils disent concernant la Torah,
même si on ne le comprend pas !
« Que les gens peuvent être sots
! » dit Rava, « Ils se lèvent devant un Sefer Torah mais pas devant
un Sage. Savez-vous que la Torah dit qu’un pécheur se doit de recevoir
40 coups de bâtons et que, seuls les ‘Hakhamim ont le pouvoir de les
réduire à 39 ? » (Makot 22b).
C’est également grâce à leurs
instructions que nous consommons toutes sortes de fruits particuliers à
Roch Hachana; nous mangeons des dattes, du miel et des grenades en espérant
que, ce faisant, nous bénéficierons d’une très bonne année. Mais
quel mérite avons-nous de manger ces fruits ? Ce sont les Sages qui ont
institué la consommation de ces fruits et la réponse est que c’est
la confiance en nos Sages, seule, qui nous permet en fait de mériter une
très bonne année.
Un jour, une personne posa une question
au Rav Shach et sa réponse fut immédiate ! « Votre question a déjà
été posée au Steipler et il y répondit de manière tout à fait satisfaisante.
Vous pouvez vous en remettre à l’avis de ce grand Tsadik et en récompense
Dieu vous aidera pour que tout se passe pour le mieux » (Pnenei Rabenou
Hakehilat Yaacov, vol. 2).
Un directeur d’une certaine banque en Israël proposa un jour à l’Administrateur
d’une synagogue importante, qu’il dépose l’argent provenant de la
Tsedaka à sa banque, lui offrant des intérêts particulièrement importants.
La banque avait bonne réputation, aussi, l’administrateur était-il
séduit par cette offre. A la même époque, une autre banque lui offrit
d’ouvrir un compte épargne à de bonnes conditions, bien que celles-ci
fussent courantes et moins alléchantes…
Se sentant un peu dans l’embarras, il décida de consulter le Rav
Chlomo Zalman Auerbach. « C’est une très belle offre et il est très
possible que les gros intérêts qui vous sont offerts par la première
banque sont un signe que celle-ci est en pleine expansion » dit-il. «
Cependant, il est possible également qu’ils vous offrent un intérêt
très élevé parce qu’ils ont désespérément besoin de votre argent;
l’opération pourra certes rapporter gros mais, du fait que cet argent
ne vous appartient pas, que c’est de l’argent provenant de la Tsedaka,
vous n’avez absolument pas le droit de prendre le moindre risque. Vous
vous en voudriez toute votre vie. Je vous conseillerai donc de choisir
la seconde offre. » Bien que la première proposition paraissait très
prometteuse, l’administrateur suivit l’avis du Rav Chlomo Zalman et
déposa une somme très importante auprès de la deuxième banque.
Moins de deux semaines plus tard, on apprit que la première banque
avait fait faillite !
Ceux qui avaient été attirés par l’appât du gain et avaient investi
des sommes importantes perdirent malheureusement tout leur argent, mais
notre administrateur avait suivi les conseils du Rav Chlomo Zalman et il
évita ainsi une perte dramatique. (Hameor Hagadol).
Vayelekh
La patience
du Maître
« Enseigne-le aux enfants d’Israël,
mets-le dans leur bouche » (Devarim 31 : 19).
Rabbi Akiva disait : « D’où tenons-nous que nous devons enseigner
la Torah à nos enfants et à nos étudiants jusqu’à ce qu’ils en
comprennent la « substantifique moelle » ? Du verset « Enseigne aux
enfants d’Israël ». Et comment savons-nous qu’elle doit être enseignée
de telle sorte qu’elle puisse être retenue dans le futur ? Du verset
« Mets-le dans leur bouche ». Ceci implique que l’enseignant se doit
d’enseigner la Torah de telle sorte « qu’elle se retrouve sur le bord
des lèvres de l’étudiant » (Erouvin 54b).
Rachi explique que transmettre des paroles de Torah est insuffisant;
l’enseignant doit apporter à ses explications un goût particulier qui
puisse convenir à « l’appétit » de l’étudiant.
La plus importante des qualités qu’un enseignant doit posséder
est probablement la vertu de la patience. Un Maître doit être prêt à
répéter son enseignement autant de fois qu’il est nécessaire jusqu’à
ce que ses étudiants le comprenne véritablement; l’enseignant ne doit
jamais renoncer jusqu’à ce qu’il soit sûr que ses étudiants ont
saisi le sujet dans tous ses aspects les plus divers.
L’expression du visage de l’enseignant est également extrêmement
importante; il doit montrer un enthousiasme constant. Il doit stimuler
sans cesse ses étudiants en les encourageant tout au long de l’étude,
afin qu’ils saisissent le sens profond de la matière étudiée.
La phrase du roi Salomon « Comme dans l’eau le visage répond au
visage, ainsi chez les hommes les cœurs se répondent » (Proverbes 27
:10) est interprétée par Rabbi Yehuda, comme se référant à l’enseignement
de la Torah.
Rachi explique que l’expression du visage du Maître a un impact
déterminant sur ses étudiants… Avec un sourire, il peut aider ses élèves
à devenir des talmidei hakhamim ! ! !
La Mishna Avot nous enseigne : « Une personne coléreuse est inapte
à l’enseignement ». Lorsqu’un Maître explique un concept difficile
et que ses étudiants ne comprennent pas, il ne doit pas s’impatienter
mais plutôt s’efforcer de répéter l’enseignement autant de fois
qu’il est nécessaire pour leur permettre une réelle compréhension…
En vérité, cette abnégation du Maître tourne souvent à son avantage…
Comme le disait Rav Hanina « J’ai beaucoup appris de mes maîtres et
encore plus de mes amis, mais c’est de mes étudiants que j’ai le plus
appris » (Taanit 7a).
La leçon tirée du verset « Mets-le dans leur bouche » est également
applicable à tout étudiant. Alors que la responsabilité de l’enseignement
incombe au maître, l’étudiant, lui, se doit de réviser encore et encore
ce qu’il a appris afin de ne jamais l’oublier. C’est là le véritable
esprit de l’étude de la Torah.
Le Rav Zalman Meltzer utilisait toutes les occasions pour inciter ses
étudiants à découvrir « des nouveautés » (‘Hidouchim) et chaque
fois qu’un étudiant s’aventurait à en proposer, le Rav s’ingéniait
à l’aider à développer cette « trouvaille ». Il l’affinait, éliminait
les détails inutiles et replaçait l’idée dans le contexte, de telle
sorte qu’il constituait une « nouveauté » très appréciable. Et puis,
il félicitait vivement l’étudiant qui, après son départ du Beth Midrash,
se « sentait aux anges ».
Assurément cette méthode galvanisait les étudiants et leur zèle
pour l’étude de la Torah s’en trouvait décuplé ! « Si je suis capable
d’avoir trouvé un tel ‘hidouch, alors je pense avoir toutes les chances
de devenir un vrai Talmid ‘Hakham » se disait l’étudiant.
C’est ainsi que Rav Zalman Meltzer eut le mérite de former des centaines
de Talmidei Hakhamim qui gardèrent, leurs vies durant, le goût et la
soif de la Connaissance (Derekh Eretz Haïm).
Vayekel
La force de l’Unité
« … Moïse fit assembler toute la communauté
des enfants d’Israël et leur dit : Voici ce que l’Eternel a ordonné
d’accomplir… » (Devarim 35 : 1).
Nos Sages ont affirmé « Le Beth Hamikdach a été détruit du fait
de la division et de la haine gratuite ».
La division et la discorde ont toujours été une source d’insécurité
et d’épreuves.
Ainsi, avant de commencer la construction du Mishkan, la première
démarche de Moïse fut-elle de rassembler le peuple; une fois que le peuple
s’était regroupé, il possédait les fondations suffisantes pour ériger
le Michkan et, pour que celui-ci puisse se maintenir longtemps, le peuple
se devait de rester uni.
L’importance de l’Unité traverse en filigrane la plupart des enseignements
de la Torah. Concernant, par exemple les lois de l’impureté et de la
pureté, la règle générale est que lorsque une plante ou un arbre est
attaché à ses racines, il n’est pas susceptible de recevoir l’impureté
(Touma); par exemple, toute végétation sur pied ne reçoit pas l’impureté,
mais dès qu’elle est arrachée de la terre, elle pourra devenir impure
si elle est en contact avec quelque chose qui est « Tamé » (impur).
Le même principe s’applique à l’homme; aussi longtemps qu’une
personne fait partie intégrante du peuple, les impuretés ont du mal à
l’affecter, cependant, si elle se sépare de la communauté, elle devient
vulnérable aux forces de l’impureté. En fait, quand un homme se retranche
du peuple pour devenir « un individu isolé », il est enclin à pécher
parce qu’il ne bénéficie pas de la protection de la communauté (Tiphéret
Samuel). A l’inverse, lorsque les gens se regroupent et travaillent ensemble,
leurs chances de succès sont multipliées de manière exponentielle. Ainsi
la réussite, notamment dans la recherche de spiritualité et le service
divin, augmente, pour chacun, lorsqu’elle s’accomplit avec ses coreligionnaires,
parce que, ensemble, ils sont comme une seule personne avec une même âme.
Pour décrire les avantages de la synergie résultant de l’Unité,
le Rav Yossef Horvitz les compare au feu. La chaleur générée par la
flambée de plusieurs bûches s’avère beaucoup plus importante que la
chaleur cumulée par autant de bûches se consumant indépendamment, parce
que le feu brûle avec une plus grande intensité quand les bûches sont
regroupées et qu’elles brûlent toutes ensemble.
Il en est de même avec les gens : la ferveur et l’engagement d’un
individu agissant seul, même s’il est très motivé, n’est pas comparable
à l’enthousiasme et à l’intensité d’une équipe qui travaille
de concert; quand les étincelles de chacun se regroupent, elles forment
un grand feu puissant qui, sans conteste, a une plus grande efficacité.
Un autre avantage déterminant : l’influence positive que chacun
peut avoir sur son prochain. Grâce au respect mutuel, chaque membre du
groupe est influencé par les qualités des autres membres; et cela s’applique,
bien évidemment, à la progression spirituelle.
Etudier ensemble, en groupe, est largement plus profitable que l’étude
solitaire.
Le Steipler affirmait que plus un groupe était nombreux et plus l’enseignement
était efficace.
Un petit-fils du Steipler rapporte que son grand-père lui déconseilla
fortement, un jour, d’étudier dans un petit Kollel parce que, disait-il,
dans un petit groupe les défauts de chacun sont beaucoup plus prononcés
et peuvent ainsi avoir une influence négative sur les autres.
Rav Eliezer disait « Garde un profil bas et tu prospèreras ». Il
considérait ainsi qu’il était avantageux pour une personne de faire
preuve de discrétion car ses défauts pourraient être rapidement détectés
et il pourrait en souffrir. Mieux vaut se fondre dans le groupe pour profiter
de sa dynamique et des qualités inhérentes à chacun de ses membres.
Quelques temps avant son départ, le Hafetz Haïm s’aperçut qu’il
existait certaines dissensions dans sa Yechiva de Radin. Il convia les
membres de la direction de la Yechiva à son domicile… « Nous étions
tous réunis autour de la table » relata le Rav Mordekhaï Zukerman et,
malgré son grand âge et sa faiblesse apparente, le Hafetz Haïm se leva
et dit avec une grande émotion « La Yechiva de Hafetz Haïm a été fondée
sur la paix et l’unité, la controverse restera dehors ! ». Il répéta
ces mots plusieurs fois en agitant sa main vers la porte comme s’il voulait
se débarrasser de quelque chose … Il ne dit rien de plus mais ses mots
étaient si enflammés qu’ils pénétrèrent le coeur de chacun des assistants…
« Depuis ce jour, disait le Rav Mordekhaï, je fuis toute controverse…
L’image du Hafetz Haïm ne quitte jamais mon esprit et sans cesse je
l’entends me répéter : « La controverse restera dehors ! » (Méir
Israël).
Nitsavim
L’humilité
« Elle n’est pas au Ciel… et elle n’est
pas au-delà des mers » (Devarim 30 : 12 & 13).
Rava explique ainsi ce verset : vous ne trouverez pas de Torah parmi
les gens arrogants qui se considèrent « au-dessus » des autres; de même,
on ne pourra pas trouver la Torah chez ceux qui pensent que leurs connaissances
sont aussi vastes que la mer. Pour sa part, Rabbi Yohanan disait que l’on
ne pouvait La trouver chez une personne à l’attitude hautaine (Erouvin
55a).
L’analogie entre la Torah et l’eau est souvent rapportée dans
notre Tradition. Par exemple « Que ceux qui ont soif se dirigent vers
l’eau » Isaïe (55 : 1). La Guemara explique que cette comparaison concerne
les fluctuations de l’eau. « De même que l’eau coule des hauteurs
vers les vallées, de même on ne pourra pas réussir dans l’étude de
la Torah si on ne « descend pas » de notre suffisance !
On retrouve la même parabole dans le chant de remerciements des enfants
d’Israël lorsqu’ils trouvèrent de l’eau dans le désert… Ils
chantèrent « le cadeau du désert » que la Guemara interprète comme
une référence à la Torah… Le verset continue « l’offrande se dirigea
dans la vallée et de la vallée sur les hauteurs, et des hauteurs vers
la vallée dans la plaine de Moav, puis jusqu’au sommet du mont… »
Ce chant enseigne que si, en recevant l’enseignement de la Torah,
une personne « descend dans la vallée », Dieu le fera monter vers les
hauteurs, mais si la personne s’enorgueillit de son savoir, alors…Il
le fera redescendre, et cependant, s’il se repent, il pourra atteindre
les sommets (Erouvin 54a).
C’est pour cette raison, que l’Eternel a choisi Moïse, l’homme
le plus humble de toute la Création, pour conduire le peuple et lui transmettre
la Torah.
Seuls, les humbles reçoivent la Torah dans sa plénitude, aussi Moïse
était-il l’homme providentiel qui put transmettre la Torah de Dieu à
Son peuple.
L’humilité du Sage, Rav Shlomo Dayan, devrait tous nous inspirer;
il se considérait inférieur à toute personne qu’il rencontrait et
se sentait totalement insignifiant. Lorsqu’il assistait à un discours
d’un homme de Torah, il écoutait attentivement chacun de ses mots, car
il considérait que si on voulait réellement apprendre, il fallait se
comporter comme un élève en présence de son Maître, jusqu’à ce que
son esprit s’ouvre et puisse assimiler toutes les nuances des enseignements
dispensés.
Dans la maison du Rav Shlomo Zalman Auerbach, pendant le mois d’Elloul,
on pouvait sentir monter l’émotion à l’approche des « jours redoutables
» (de Roch Hachana à Yom Kippour).
Un jour, pendant cette période, un homme rendit visite au Rav pour
lui demander une bénédiction pour une bonne année, tant au niveau spirituel
que matériel. Le Rav lui tendit la main et lui dit « Laissez-moi vous
dire quelque chose… Un jour, mon Rebbe, le Rav Issur Meltzer, me parlait
au sujet d’une pratique, qui était devenue plus ou moins une tradition
dans notre Yechiva, et qui consistait à demander au Roch Yechiva une bénédiction
à la veille des fêtes. Les étudiants venaient ainsi lui demander de
prier pour qu’aucun mal ne les atteigne…
« Entre vous et moi, les étudiants de cette Yechiva sont largement
meilleurs que moi » me souffla le Rav Issur « leur crainte de l’Eternel
est, de loin, plus grande que la mienne et ils sont beaucoup plus scrupuleux
que moi pour l’accomplissement de leurs devoirs. Alors, pourquoi viennent-ils
à moi pour solliciter une bénédiction ? Pourquoi mes prières pourraient-elles
être plus efficaces que les leurs ? Et même si mes facultés étaient
supérieures aux leurs, est-ce que cela me rendrait meilleur qu’eux ?
»
Si le Rav Issur Meltzer disait cela, conclut le Rav Shlomo Zalman,
« alors que pourrais-je dire à mon sujet ? »
Ki Tavo
Diffuser la parole divine
« … Arour acher lo yakim ett divre ha
Torah hazot laassot otam… Maudit soit celui qui ne maintiendra pas les
paroles de cette Loi pour les mettre en application » (Devarim 27 : 26).
La Guemara nous enseigne que toutes les malédictions citées dans
cette section de la Torah sont en réalité précédées par une bénédiction…
La présente malédiction est ainsi précédée par « Béni soit celui
qui respectera les paroles de la Torah pour les accomplir ».
Le Rav Aha rapporte que Rav Tanhoum, fils de Rav Hiya, disait : «
Si une personne a étudié et enseigné la Torah, qu’elle a accompli
Ses Commandements mais a négligé de la diffuser auprès de son entourage,
alors qu’elle en avait la possibilité, elle relève assurément de la
malédiction… A l’inverse, si elle renforce la Torah en la propageant
auprès de son entourage, elle méritera la bénédiction alors même qu’elle
ne l’étudie pas et n’accomplit pas Ses commandements (Talmud Jérusalem,
Sota 7 : 4).
Il est clair que cela ne veut pas dire que cette personne peut atteindre
le même niveau spirituel que ceux qui s’investissent dans l’étude
de la Torah nuit et jour… Ce que veut dire Rav Aha c’est que ceux qui
divulguent la Torah méritent les bénédictions de l’Eternel.
La Torah est un « Arbre de Vie pour ceux qui s’y attachent : s’y
attacher c’est s’assurer la félicité » (Proverbes, 3 : 18).
Selon le Hafetz Haïm « s’attacher à l’Arbre de Vie » implique
deux idées; elle invite chaque Juif à participer au moyen de ses propres
deniers, de ses propres deniers, à l’étude de la Torah et nous enjoint
de jouer un rôle actif dans le maintien et la diffusion de son étude.
Dans les Seli’hot que nous récitons pendant la présente période
de Techouva, nous disons notamment « Sainte Torah, prie pour nous ».
Le Hafetz Haïm explique cette phrase de la manière suivante : alors que
le Saint Jour de Yom Kippour approche, nous sommes inquiets au sujet de
notre inscription éventuelle sur le Livre de la Vie; aussi, à l’occasion
des Seli’hot demandons-nous à la Sainte Torah « la Fille de l’Eternel
» d’intervenir en notre faveur pour susciter la pitié du Juge Suprême…
Et en réponse, la Torah répond « Et qu’avez-vous fait pour M’honorer
pendant toute l’année ? Etes-vous venus en aide aux étudiants de la
Torah pour les nourrir et les vêtir ? Vous êtes-vous assurés qu’ils
ne manquaient de rien pour leur permettre d’étudier la Torah en toute
tranquillité ? Si oui, alors j’accomplirai mon rôle et demanderai à
l’Eternel d’avoir pitié de vous… A défaut…
Il incombe à chacun d’entre nous, conclut le Hafetz Haïm, de «
vivre en bons termes avec la Sainte Torah afin qu’Elle nous assiste pendant
les jours redoutables (Yamim noraïm).
Au sujet de l’époque messianique, dans laquelle nous vivons assurément,
le prophète Amos disait « Il périront par l’épée tous les pervers
de Mon peuple, ceux qui disent : Le malheur ne saurait nous approcher ni
nous surprendre » (9 : 10). Ce décret sera inévitablement exécuté,
dit le Hafetz Haïm, « et ceux qui sont riches aujourd’hui doivent savoir
qu’ils ne garderont pas leur richesse éternellement » et cela est irrémédiable.
« Les gens sensés dépenseront leur argent pour favoriser l’étude
de la Torah : c’est le seul moyen de conserver sa fortune pour toujours
et ceux qui ne l’ont pas compris le regretteront quand il sera trop tard…
»
Ki Tetse
Le devoir de restituer
les objets trouvés
« Si tu vois s’égarer le bœuf ou la
brebis de ton frère… ou tout vêtement ou objet qu’il aura perdu et
que tu retrouverais; tu ne te déroberas pas » (Devarim 22 : 2 & 3).
Bahia Ibn Paqouda écrit qu’un des objectifs de cette mitsva est de
nous entraîner à la bonté et à la considération de notre prochain.
La Torah souhaite que nous portions un intérêt véritable au bien-être
et à la préservation des biens d’autrui. Que ce soit un animal ou un
objet perdu, celui qui l’a trouvé se doit de chercher à le restituer
à son propriétaire, et c’est pourquoi, le verset précise « Tu ne
te déroberas pas… ».
De même, dans son ouvrage « Torat Habaït », le Hafetz Haïm écrit
que la Torah préconise que l’on se préoccupe des intérêts de son
prochain… même si celui-ci risque de ne pas se comporter de la même
manière. Par exemple, si le bœuf de votre adversaire erre dans les rues,
vous vous devez de prendre l’initiative de le lui ramener et cela est
également valable pour les objets de valeur comme pour les biens de peu
d’importance.
Et le Hafetz Haïm de conclure que, si nous constatons que notre prochain
néglige ses propres biens, il est de notre devoir de l’inciter à être
plus attentif afin d’éviter que ses biens ne se détériorent… et
cela devient encore plus urgent si sa maladresse et son inattention risquent
d’affecter sa santé physique ou morale et celle d’autrui…
La grande récompense de cette mitsva, surtout si elle faite à titre
désintéressé, peut être déduite de la règle de droit concernant le
voleur de moutons !
La Torah nous dit que celui qui vole un boeuf (et l’abat) doit payer
à son propriétaire 5 fois sa valeur et celui qui vole un mouton doit
payer 4 fois sa valeur à son propriétaire… Son amende est ainsi réduite
parce qu’il doit supporter la charge de le transporter chez son propriétaire
!
Si la Torah s’intéresse tant à celui qui a commis une infraction,
dit Rav Eliahou Lopian, combien alors récompensera-t-elle la personne
qui, malgré le dérangement occasionné, s’empressera de « ne pas se
dérober » à la mitsva et restituera son bien à son prochain.
Les mesures de bonté de Dieu sont beaucoup plus importantes que Ses
mesures punitives et l’on peut être sûr que la récompense qui attend
celui qui retourne un objet perdu est assurément exemplaire.
Un marchand de farine de Jérusalem perdit un jour son portefeuille…
et cela tombait très mal car il contenait tout l’argent qu’il avait
mis de côté pour acheter son nouveau stock de farine !
Il était désespéré et chercha partout, dans les rues, dans les
différents endroits où il était passé et il afficha même un avis de
perte dans plusieurs quartiers de la ville… mais en vain.
Après trois jours de recherches sans résultats, très déprimé,
il s’en fut rendre visite au Maharil Diskin pour lui faire part de son
infortune… Le Maharil ne dit pas grand chose et lui donna la bénédiction
d’usage (Berakhot 16b) « Puisse Dieu réparer votre perte ».
Tard dans la nuit, ce même jour, il entendit frapper à sa porte…
C’était une dame âgée qui tenait dans sa main le portefeuille !
On ne peut décrire la joie qui s’empara du marchand et de toute
sa famille… et puis, on demanda à la dame dans quelles circonstances
elle avait trouvé le portefeuille.
En tremblant quelque peu, la vieille dame commença son histoire : «
Il y a trois jours, j’ai trouvé ce portefeuille et, étant la pauvre
femme que je suis, je remerciais vivement l’Eternel pour le beau cadeau
qu’il m’avait envoyé. Le jour suivant, mon voisin m’informa qu’un
marchand de farine avait perdu son portefeuille et qu’il le recherchait
désespérément. Malgré cela, ne désirant pas me séparer de ma trouvaille,
je me tus. Bien sûr, je ne me sentais pas très bien, mais vu ma situation,
je n’étais pas prête à renoncer à cette aubaine… Ce soir, pourtant,
après m’être mise au lit, je me sentis profondément coupable, je me
demandais comment mon acte serait considéré dans le Ciel et quelle punition
je recevrais en Enfer… Mes pensées m’empêchèrent de dormir et je
décidais de mettre fin à mes angoisses et à vous rapporter le portefeuille
(Hasraf mi Brisk).
Choftim
Etre Positif
« … Ve choftou ett haam michpat tsedek…
et ils jugeront le peuple selon Ta justice… » (Devarim 16 : 18).
Le Midrach Tanhouma interprète en disant « ils jugeront le peuple
avec clémence » c’est à dire en intercédant en sa faveur par un exposé
de leurs mérites et de circonstances atténuantes… Le Midrach donne
l’exemple de Gedeon, fils de Joas. A son époque, les juifs se trouvaient
dans une grande détresse et Dieu cherchait quelqu’un qui pût faire
valoir pour eux des mérites; or, la génération était très pauvre en
« craignants-Dieu »; quand l’Eternel trouva Gedeon, celui-ci s’ingénia
aussitôt à intervenir en faveur du peuple. Un ange lui apparut et lui
dit : « l’Eternel est avec toi, homme héroïque ! » Et Gedeon lui
répondit : « Hélas ! Si l’Eternel est avec nous, d’où vient tout
ce qui nous arrive ? Que sont devenus tous Ses prodiges que nous ont contés
nos pères disant : N’est-ce pas l’Eternel qui nous a fait sortir d’Egypte
? Maintenant l’Eternel nous délaisse et nous livre aux mains de Midian
!
» Alors, l’Eternel s’adressa à lui : « Va avec cette force qui t’anime
et tu sauveras Israël de la main de Midian ».
Le Hida écrit que le peuple doit être très attentif à ne jamais
parler de façon négative du peuple juif. Moïse notre Maître qui, une
seule fois, les traita de rebelles en subit les conséquences néfastes
(Houkat 20 : 10). C’est la volonté de Hakadoch Baroukh Hou qui nous
enjoint de parler favorablement du Peuple d’Israël et même ceux dont
la mission est de réprimander – si nécessaire – doivent s’attacher
d’abord à mettre en exergue ses mérites.
Le Rav Levi Itshak de Bertitchev utilise ce principe pour expliquer
la prière du Cohen Gadol le jour de Yom Kippour. « Une année au cours
de laquelle Ton peuple ne sera pas asservi, ni par ses pairs ni par une
autre nation ». Nous prions ainsi l’Eternel pour qu’Il nous donne
le mérite de nous en remettre à Sa clémence plutôt que d’avoir à
compter sur les autres pour nous sauver.
Le Rav Papa avait l’habitude d’enrichir ses enseignements en les
ponctuant d’éloges à l’égard de ses compatriotes. C’était de
cette manière qu’il tentait d’aider ses frères à trouver grâce
aux yeux de l’Eternel. Un jour, à l’occasion de la paracha Reeh, le
Rav affirma que cette section de la Torah nous enseignait combien l’Eternel
aimait à trouver des mérites chez Son peuple qu’Il jugeait favorablement
même s’il n’avait pas toujours un comportement sans reproche. Il citait
le deuxième paragraphe de Reeh « … la bénédiction, si vous écoutez
les commandements de l’Eternel… » que Rachi commente d’ailleurs
d’une manière surprenante en considérant que les bénédictions sont
accordées à la seule condition que l’on respecte les commandements
! Que rajoute donc Rachi ? N’est-ce pas le sens évident du verset ?
En fait, Rachi dit que ce type de réserve que la Torah stipule joue
le même rôle, dans les grandes lignes, que la Guemara lorsqu’elle veut
justifier une condition.
La Guemara enseigne que lorsqu’une personne dit, par exemple, «
Je te donne cet objet à condition que tu fasses ceci ou cela » la propriété
de l’objet est immédiatement transférée à celui qui le reçoit, bien
que celui-ci n’ait encore rempli aucune des conditions de son acquisition.
Néanmoins, si à aucun moment il n’a rempli la ou les conditions préalables,
l’objet reviendra, rétroactivement, au propriétaire initial. C’est
exactement ce qui se passe dans notre cas, dit le Rav Papa : «Dieu aime
faire pleuvoir les bénédictions sur Son peuple. Lorsqu’Il agit ainsi,
nous en ressentons immédiatement les effets favorables. Cependant, si
nous n’accomplissons pas Ses commandements, les bénédictions nous seront,
en fin de compte, retirées » (Toledot, Vayehi Yossef).
Réeh
Donne et tu t’enrichiras
« … Asser teasser ett kol tevouat zarekha…
Prélève la dîme de toute la récolte de ta semence… » (Devarim 14
: 22).
Nos Maîtres interprètent l’expression « asser, teasser » en précisant
« Asser bichvil teasser » « Prélève afin de t’enrichir ». Comment
savons-nous que nous sommes tenus d’effectuer un prélèvement sur tous
nos revenus, alors que le verset ne s’applique apparemment qu’aux récoltes
agricoles ? Parce que le mot « kol – tout » nous enseigne que nous
devons donner une partie de tous nos gains à la Tsedaka (Taanit 9a). Nos
Maîtres concluent ainsi que celui qui donne un dixième de ses revenus
pour la Tsedaka deviendra riche !
D’où tirent-ils cette certitude ? Le Gaon de Vilna explique cette
notion par analogie avec d’autres expressions de la Torah « Chaleah
tichlah » « Envois et tu enverras » ou « Okheah tokheah » « Prouves
et tu prouveras »; il prétend que ces expressions signifient qu’une
personne dois réitérer l’acte autant de fois qu’il est nécessaire…
Alors, comment ceci peut-il s’appliquer au prélèvement de la dîme
si ce n’est pour nous préciser qu’il convient de le faire et de pouvoir
le faire encore ? Nos Maîtres concluent que Dieu bénira la personne qui
donnera ce qu’il est supposé devoir donner, de telle sorte qu’il sera
en mesure de donner la dîme sur ses revenus encore et encore !
Rav Levy rapporte l’histoire suivante dans le Midrach Tanhouma : il
s’agit d’un homme qui possédait un champ qui produisait 1000 quintaux
de blé par an sur lesquels il prélevait scrupuleusement 100 quintaux
pour la Tsedaka. Avec les 900 quintaux restants, il pouvait aisément subvenir
aux besoins de sa famille. Sentant sa fin proche, il dit à son fils aîné
« Fais attention à ce que je vais te dire, mon fils. Ce champ que je
te laisse en héritage produit exactement 1000 quintaux de blé par an
et le dixième de la récolte doit absolument être donné au titre du
Maasser. Je n’ai jamais failli à cette mitsva durant toute ma vie et
j’ai pu ainsi vous nourrir et vous entretenir avec ce seul champ. »
La première année, le fils ensemença le champ qui produisit exactement
ce que son père lui avait indiqué. Il donna consciencieusement le dixième
de la récolte pour le maasser… Cependant, l’année suivante, devant
l’importance de la quantité de blé destinée au maasser, il réduisit
son don de dix pour cent. L’année suivante, le champ ne produisit que
900 quintaux au lieu de 1000 ! Année après année, du fait de la réduction
de sa récolte, il donna de moins en moins au titre du maasser jusqu’à
ce que le champ ne produise plus que 100 quintaux par an ! !
Lorsque la famille vit combien leur champ produisait, ils se vêtirent
de blanc et se dirigèrent vers leur frère aîné… En les voyant, il
leur dit « Ah, vous êtes venus vous réjouir de mon échec ? »
- « Pas du tout » lui dirent-ils. Nous sommes venus nous réjouir
avec toi parce que, jusqu’à présent, tu agissais comme un travailleur
et Hakadoch Baroukh Hou, à qui tu reversais la dîme était comparable
au Cohen; maintenant que tu ne récoltes plus que le dixième de la récolte
ancienne, tu as mérité de prendre la place du Cohen ! »
Un jeune étudiant, désargenté, décida de rejoindre la Yechiva de
Volozhin avec l’intention d’utiliser, pour ses besoins personnels,
l’argent qu’il avait destiné à la Tsedaka, conforté en cela par
l’avis de certains décisionnaires qui permettaient cet usage dans le
cas où l’argent était utilisé pour l’étude de la Torah. Il eut
quand même certains scrupules et demanda à consulter le Roch Yechiva,
le Rav Haïm de Volozhin; il se demanda même s’il ne devait pas restituer
les sommes qu’il avait déjà dépensées pour son usage personnel…
Le Rav Haïm lui dit, qu’en effet, il était préférable d’essayer
de s’arranger avec son propre argent mais, que de toutes façons, il
n’avait pas à rembourser les sommes d’ores et déjà dépensées puisqu’il
les avait utilisées pour étudier la Torah. Et puis, le Rav lui raconta
que lorsqu’il était étudiant, il avait été confronté au même problème
et qu’il avait souhaité demander son avis au Gaon de Vilna; mais cela
ne put se faire; alors, du fait qu’il avait dépensé tout son argent,
il réalisa que cette mésaventure lui était arrivée parce qu’il n’avait
pas évalué les conséquences de son imprévoyance. « A la fin, je remboursais
aux pauvres tout ce que j’avais dépensé pour mes besoins personnels
et, finalement, Dieu me restitua intégralement tout l’argent que je
leur avais donné à titre de Tsedaka » dit le Rav Haïm de Volozhin (Keter
Roch).
Ekev
La discrétion
« Car je craignais cette colère
qui animait l’Eternel du désir de vous détruire » (Devarim 9 : 19).
Dans cette section de la Paracha, Moïse notre Maître raconte au peuple
les péripéties des quarante jours et quarante nuits passés auprès de
l’Eternel… Accablé, dépité, malheureux, il manifeste au peuple sa
déception d’avoir à constater, qu’en son absence, ils ont péché
et se sont détournés de Dieu. Craignant que Dieu ne donne libre cours
à Sa colère et détruise Son peuple, Moïse « se jeta à terre devant
l’Eternel et, une fois encore, il passa quarante jours et quarante nuits
sans boire ni manger… » (Devarim 9 : 18) et pendant toute cette période,
il supplia l’Eternel d’épargner Son peuple.
Pour évaluer la valeur de la mitsva « Matane bessetter » (donner
de façon discrète ou cachée) la Guemara (Baba Batra 9b) rapproche ce
verset du proverbe « Un don anonyme fait tomber la colère » (21 :14)
et conclut que « celui qui donne en secret est plus grand que Moïse Rabénou
». Les Tossefot expliquent que cela ne veut pas dire véritablement que
le bienfaiteur est plus grand que Moïse, mais plutôt que le don secret
ou anonyme calme la colère de Dieu peut-être plus encore que les prières
de Moïse.
Nos Sages rapportent à cet effet le dernier verset de l’Ecclésiaste
(Kohelet 12 :14) : « Car l’Eternel jugera tous les actes – même cachés
– qu’ils soient bons ou mauvais ».
Il y avait un pauvre homme à qui un certain Mar Ukva avait l’habitude
de donner 4 zouz chaque nuit en les glissant sous sa porte… Le pauvre
trouvait cette somme tous les matins mais n’en connaissait absolument
pas l’origine… Un jour, il se résolut à percer le secret de l’identité
de son bienfaiteur et attendit, très tard, dans la nuit à sa fenêtre.
Ce soir-là, Mar Ukva fut retardé dans la Maison d’Etudes et son épouse
dut l’accompagner chez le pauvre homme… Dès que le pauvre vit le couple
se diriger vers sa maison, il sortit pour les accueillir mais, Mar Ukva
et son épouse s’enfuirent prestement… et puis, ils se cachèrent dans
un four qui semblait éteint… mais il était encore très chaud et Mar
Ukva se brûla le pied… « Mets ton pied sur le mien » lui dit sa femme
dont les pieds avaient été épargnés… Mar Ukva réalisa que sa femme
avait certainement plus de mérite que lui et regretta de ne pouvoir l’égaler.
Son épouse lui dit « Saches qu’il y a une raison particulière pour
laquelle mes pieds ne sont pas brûlés; je suis toute la journée à la
maison et je donne à manger à ce pauvre chaque fois qu’il passe devant
chez nous; toi, tu lui donnes de l’argent mais il doit aller se fatiguer
à acheter des produits et préparer sa nourriture… » (Ketoubot, 67b).
Il était une fois un homme très riche qui avait la réputation d’être
très avare; chaque fois qu’une personne lui demandait de l’argent,
il refusait systématiquement… Il était très largement critiqué…
Dans la même ville, vivait un homme modeste très connu pour sa grande
générosité; il ne refusait jamais de faire des dons et assistait largement
la Communauté… Un jour, l’avare mourut et les gens continuèrent à
demander des dons à l’homme modeste, mais celui-ci dut les éconduire.
« Je n’ai plus d’argent » dit-il et il expliqua « Tout l’argent
que j’ai distribuais pendant des années appartenait à l’homme riche
que vous considériez comme un avare et un mécréant; il ne voulait bénéficier
d’aucun honneur, il voulait tout simplement accomplir la mitsva de la
manière la plus discrète et il acceptait, malgré cela, d’être considéré
comme un avare par tous ses concitoyens… »
Lorsque le Baal Shem Tov eut vent de cette histoire, il en fut bouleversé
« Cet homme est digne d’éloges et sa place dans le Olam Haba est assurément
exemplaire ».
Vaethanan
Se garder de la convoitise
« Velo tahmod echet rehekha; velo
tithave bait rehekha sadehou veavdo… vekol acher lerehekha » « Tu ne
convoiteras pas la femme de ton prochain; tu ne désireras ni sa maison,
ni son champ ni son serviteur… rien de ce qui appartient à ton prochain
»
(Devarim
5 : 18).
Selon Rachi, ce commandement s’entend stricto sensu, comme
une interdiction de convoiter ou de désirer ce que son prochain possède;
pour sa part, le Mechilta considère qu’il s’agit en fait de
deux Mitsvot « lo tahasse » différentes.
La différence entre ces deux injonctions, « lo tahmod et lo tithave
», est expliquée par Maïmonide comme relevant, respectivement,
de questions relatives à la pensée et à l’action; ainsi, lorsque que
quelqu’un voit la maison de son prochain et qu’il la désire comme
sienne, il enfreint l’interdiction « lo
tithave – tu ne désireras pas » alors que, s’il incite son prochain
à vendre sa maison, il s’agit alors d’une violation de « lo tahmod
– tu ne convoiteras pas »(Sepher hamitsvot 266).
Or, comment la Torah peut-elle interdire à une personne de désirer
ce qui appartient à son prochain puisqu’il s’agit d’un sentiment
naturel qui naît spontanément, instinctivement ?
Ibn Ezra compare cette interdiction à un pauvre qui pose son
regard avec envie sur une belle princesse. Aurait-il l’intention de l’épouser
? Certainement pas, car il est convaincu qu’il n’a vraiment aucune
chance…
De même, une personne ne désire pas vraiment avoir des ailes pour
voler car elle est convaincue que cela est impossible… Eh bien, c’est
l’attitude qu’il convient d’avoir relativement à l’accomplissement
des Mitsvot. Si la Torah nous interdit telle ou telle attitude, alors on
doit la considérer comme une impossibilité absolue; donc, si nous voyons
un bien qui nous plait dans le patrimoine de notre voisin, on ne le désirera
pas, un point c’est tout. Tout ce qui ne nous appartient pas est à l’image
de cette belle princesse que le pauvre n’épousera jamais…
Le Rav Meyer Hadache avait l’habitude de dire que dans sa
ville de Slabodko, ils avaient adopté une approche tout à fait inverse
« Nous sommes tous des fils et filles de Rois
et nous ne sommes absolument pas jaloux des pauvres; aussi comment serions-nous
envieux des biens dérisoires qui appartiennent à notre prochain ?
»
Pour sa part, le Rav Eliahou Lopian utilisait la parabole suivante
: un homme rend visite à un ami qui lui dit
« Laisse-moi te montrer ce que je viens
de payer très cher », et il lui montre… une armoire
pleine de médicaments « C’est mon médecin qui m’a ordonné ces médications
si coûteuses » et le visiteur, de se dire en lui même
« Dieu merci je n’ai pas besoin de toutes
ces drogues ! »
Cela ne fait aucun doute : Personne au monde ne pourrait envier «
cette
fortune » !
C’est ainsi qu’une personne doit se comporter par rapport aux biens
qui ne lui appartiennent pas… Ce faisant, il sera content de son sort
et sera appelé « un homme riche » !
Le Rav David Deutch, auteur de Ohel David, était toujours
très satisfait de sa condition malgré sa pauvreté extrême… Un jour,
le
Hatam Sofer lui rendit visite alors que Rav David était en train
de déjeuner…
Le Hatam Sofer put entrevoir, en un instant, l’étendue de la pauvreté
qui se dégageait de cette maison… Il ne put contenir son étonnement
en voyant la vieille assiette et la cuillère de bois dont se servait le
Rav David pour manger… Il prit la cuillère et l’examina longuement…
Le Rav David ne comprit pas très bien pourquoi le Hatam Sofer examinait
avec tant de soin cette cuillère de bois et il considéra qu’il l’évaluait
avec admiration comme s’il s’agissait d’une pièce ancienne, de grande
valeur !…
Ne souhaitant pas que le Hatam Sofer transgresse l’interdiction «
Tu ne désireras pas » il lui dit promptement « Vous
pouvez garder la cuillère, je vous l’offre de tout mon coeur ».
Le ‘Hatam Sofer aimait raconter cette histoire qui illustre la pureté
d’un homme pauvre… qui se considérait comblé !
« Qui est riche ? Celui qui est content
de sa part » est-il précisé dans les maximes des Pères.
Rav David était si convaincu de « sa richesse » qu’il ne
lui vint pas à l’idée que le Hatam Sofer pouvait avoir pitié de lui,
mais plutôt que son visiteur souhaitait vivement posséder son unique
cuillère de bois.
(Guedole hadorot, vol. 2).
Devarim
Des Lois pour la Paix
« Lo takirou
panim … » « Vous
ne favoriserez personne en jugeant, vous écouterez le petit comme le grand,
vous ne tremblerez devant personne car la Justice appartient à Dieu »
(Devarim
1 : 17).
Selon Rabbi Yehouda, « Lo takirou panim
»
signifie littéralement : vous ne reconnaîtrez pas un visage et cela implique
que si un juge a une relation amicale avec un des plaignants, il ne doit
absolument pas tenir compte de cette relation de crainte de le favoriser
et, à l’inverse, si un juge a de l’aversion pour un plaideur, il lui
est interdit de le défavoriser…
Ce verset impose au juge de trancher les litiges
de manière objective sans être influencé par la condition des parties
au procès (Sanhedrin, 7b).
Nos Sages nous enseignent qu’un Dayan doit
se considérer comme le partenaire de Hakadoch Baroukh Hou dans
la Création du Monde (Chabath 10a). Pour sa part, le Tour explique
dans ‘Hoshen Michpat (1) que Dieu a créé le monde afin qu’il se perpétue,
or il existe malheureusement des gens malfaisants qui volent ou commettent
toutes sortes d’actes immoraux et qui participent ainsi à sa destruction.
Ainsi, à l’époque de Noé, le monde
a été englouti en grande partie à cause du vol qui était devenu une
pratique courante et incontournable et c’est pourquoi on peut affirmer
que celui qui essaie de rétablir la justice entre les hommes perpétue
l’existence du monde, aussi, le Dayan est-il considéré, dans l’accomplissement
de sa mission, comme un partenaire de la Création.
Lorsque Ythro conseilla à son gendre
Moïse
de
désigner les juges et d’établir un système judiciaire, il conclut
en disant « Alors Dieu guidera tes
pas et tu pourras mener ce peuple vers sa destination, dans la paix
» (Chemot 18 : 23).
Le Hafetz Haïm explique que, ce faisant,
Ythro précisait à Moïse que le rôle primordial d’un Dayan était
d’obtenir la restitution à son véritable propriétaire d’un bien
ou d’une somme d’argent qu’une autre personne s’était approprié
malhonnêtement… En d’autres termes, en jugeant le peuple selon les
Lois de la Torah, les dayanim l’aident à atteindre
« sa destination dans la paix ».
Il faut savoir que lorsqu’une personne commet
un vol – aussi minime soit-il – et ne restitue pas ce qu’elle a dérobé
avant son décès, elle devra revenir en réincarnation dans ce monde pour
assumer le règlement de sa dette et, c’est pourquoi, les dayanim qui
condamnent les gens à payer leurs dettes ou le fruit de leurs vols, leur
permettent « d’arriver à leur destination en paix ».
Un homme rendit visite un jour au Rabbi de
Gour, Rav Mordekhaï Alter, se plaignant d’avoir été poursuivi
devant un Beth Din par un de ses amis. Cet homme avait préparé avec beaucoup
d’attention son dossier et était tout à fait convaincu de son droit
et pourtant les juges l’avaient condamné à payer !
Le Rabbi dit alors «
Je comprends enfin le sens d’un Midrach que j’ai longtemps eu du mal
à saisir… Ce Midrach précise que les lois édictées par Dieu pour
le peuple juif sont une source de conflits entre eux… Toutefois, en fin
de compte, elles permettent aux dayanim de résoudre les conflits dans
l’intérêt des parties. Cela m’a toujours troublé ! En ce qui concerne
cette affaire, peut-on dire que ce sont les lois de la Torah qui ont généré
une controverse ? Maintenant, le sens de ce Midrach me paraît beaucoup
plus clair »
dit le Rabbi : «
Hakadoch Baroukh Hou a donné ces lois à tout le Peuple Juif, et chacun
d’entre nous a la possibilité de les étudier en profondeur… Naturellement,
chacun en tirera ses propres conclusions et le conflit s’envenimera évidemment
lorsque chacune des parties sera convaincue que le « bon droit » est
de son côté.
Néanmoins, les lois de la Torah
génèrent, en fin de compte, la Paix parmi le peuple parce que le Dayan
en se referant à l’esprit de la loi de l’Eternel, peut juger équitablement,
en son âme et conscience »
(Roch
G. Ariel)
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