Massei
Se garder de la flatterie
« Vous ne susciterez pas la culpabilité
du pays où vous vous trouverez… » (Bamidbar 35 :33).
Selon le Sifri, ce verset constitue la source de l’interdiction faite
par la Torah de toutes formes d’hypocrisie ou de flatterie. De plus,
le Yereim (chap. 55) affirme que le verset suivant (Bamidbar
35 : 34) « Vous ne souillerez pas le pays
où vous allez demeurer et au milieu duquel Je résiderai
»
indique que la flatterie finit, irrémédiablement, par souiller la terre.
Aussi, celui qui s’adonne à la flatterie transgresse-t-il deux Commandement
négatifs et chasse la Présence divine du sein du Peuple d’Israël (Sota
41a).
Pour décrire la forme de flatterie contre laquelle la Torah nous met
en garde, le Yereim écrit : « Celui qui est
informé d’une corruption de moeurs ou d’un acte injuste et reste silencieux
– par faiblesse, méchanceté ou pour éviter de se créer des ennemis
– est appelé flatteur et transgresse un commandement négatif…
Et cela s’applique également à celui qui flatte dans l’intention
de préserver des bonnes relations avec une personne malfaisante. Comme
le précise la Guemara (Sota), lorsque certains Sages dirent à Agrippas
« Ne crains rien, Roi Agrippas, vous êtes
notre frère ! » le peuple mérita d’être sanctionné
parce qu’il avait flatté Agrippas.
Selon la Loi, Agrippas aurait dû être disqualifié de son poste de
Gouverneur du peuple Juif, mais lesdits sages le flattèrent afin de s’attirer
ses faveurs.
Nous apprenons de cet événement que, même lorsqu’il s’agit de
la crainte révérencielle due à un roi, il n’y a aucune excuse à la
flatterie… Le peuple d’Israël était coupable car il aurait dû, plutôt,
craindre le Roi des Rois qui dit : « Tu prendras
un roi au milieu de tes frères, tu ne pourras pas te donner à un étranger,
qui ne soit pas ton frère » (Devarim 17 : 15).
Et, de même, il est interdit à un Juif d’ignorer le Commandement
de la Torah « Tu ne craindras aucun homme
» (Devarim 1 : 17). En effet, si une personne ferme les yeux sur
les mauvais agissements d’un être qu’il n’a pas de raison de craindre,
alors il est certainement coupable !
Une telle personne est assimilée à un menteur et un hypocrite qui
encourage encore plus la personne qu’il flatte, à persévérer dans
son mauvais comportement.
Il convient, en conséquence, pour tout un chacun, de désavouer résolument
les mauvais comportements plutôt que de les excuser; ce faisant, il suscitera
des mérites pour lui-même et pour son peuple (Menorat haméor, vol.
1).
Le Rabbi Zorah Ruben Braverman, qui fut par la suite le fondateur
de la Yechiva Mea Shearim à Jérusalem, voyageait un jour en direction
de Ishishok, lorsque le train s’arrêta à Vilna pour la journée, en
raison d’un contrôle technique. Rabbi Braverman décida de profiter
de cette occasion pour aller étudier dans l’une des nombreuses Maisons
d’études de la « Jérusalem de Lituanie »… Pendant qu’il
étudiait, Rabbi Braverman vit un jeune homme s’adresser à un responsable
pour lui demander de lui expliquer un passage de la Guemara.
Choqué par une telle question, le responsable s’écria indigné
« Tu veux me faire croire que tu ne sais pas
ce que cela veut dire ? C’est inadmissible ! »
Rabbi Braverman vit que la question posée était, en effet, très
élémentaire et il fut désolé de constater la faiblesse de cet étudiant,
mais fut surtout déçu par la manière dont le responsable lui avait répondu.
Et puis, comment se faisait-il qu’à Vilna, le plus grand Centre d’Etudes
Talmudiques d’Europe, il y ait des jeunes gens aussi ignorants ? Et puis,
comment se faisait-il qu’il n’y avait pas, à Vilna, des maîtres qui
puissent éduquer de tels étudiants ?
Lorsqu’il reprit le train, il se confia à son plus proche voisin
« Comment se fait-il qu’à Vilna il n’y
ait pas d’école pour former des jeunes gens qui n’ont pas reçu de
formation en Yechiva ? » questionna-t-il.
« Qui voulez-vous qui prenne en
charge de créer une telle institution ? Rabbi Untel ou Untel ?
», et le voisin cita une liste de noms de rabbins très influents… A
l’écoute de ces noms prestigieux, Rabbi Braverman, très embarrassé,
répondit à son voisin – « Mon cher coreligionnaire,
ne m’en veuillez pas mais je viens de finir l’étude du livre du Hafetz
Haïm et je peux vous dire que le « colportage » (lachon arah) est une
grave transgression …
Le voyageur regarda Rabbi Braverman avec un air amusé : «
Ah
vraiment, vous avez étudié le livre du Hafetz Haïm ?
»
– « Absolument, je l’ai là dans ma
valise
»
Le voyageur commença à parcourir le livre et pointa un certain nombre
de pages.
– « Avez-vous vu ce qui est écrit dans
tel et tel chapitre ? » demanda-t-il.
Il s’avérait, en effet, que, dans certaines circonstances, il était
tout à fait possible de citer des noms de personnes, justement pour que
cela parvienne à leurs oreilles et que cela les incite à accomplir telle
ou telle bonne action.
En citant volontairement le nom de certains rabbins, le voyageur espérait
qu’un peu de flatterie – bien dosée – pourrait les inciter à se
lancer dans la création de telles institutions.
Le voyage se poursuivit jusqu’à l’embranchement des voies qui menaient
à Ishishok et Radin… Là, l’homme qui n’avait pas décliné son
nom descendit et salua…
Rabbi Braverman descendit quelques instants sur le quai et, en discutant
avec d’autres passagers, il découvrit que l’homme à qui il avait
adressé des remarques relatives au colportage et à la médisance, n’était
autre que le Hafetz Haïm ! (Talelei Orot Michpatim).
Mattot
Choisir ses mots avec
prudence
« Il ne peut violer sa parole : tout ce
qu’a prononcé sa bouche, il doit l’accomplir … » (Bamidbar 30 :
3).
Ce verset nous enseigne que nous devons accorder une importance essentielle
à chacune des paroles que nous émettons; celles-ci ne doivent jamais
être vaines ou inutiles car la parole est précieuse, voire sacrée.
En effet, si une personne utilise des paroles inconsidérées elle
pourrait susciter des forces négatives qui auraient des effets sur le
monde entier… et risqueraient de créer des anges accusateurs.
A l’inverse, si elle choisit ses mots avec prudence et qu’elle
les utilise de manière à générer des sentiments élevés, elle aura
un impact positif sur la société toute entière.
Le Ari Zal considère que « chaque mot qui sort de la bouche,
dans ce monde, se réalisera par la Volonté d’en Haut » (Likouté
Torah – Ekev).
Au travers de son discours, chacun d’entre nous a le pouvoir de créer
des influences positives ou néfastes à l’égard de son prochain. Nos
Sages disent que nous ne devons pas prendre à la légère les bénédictions
d’un homme ordinaire (Meguila 15a) car ses effets peuvent provoquer
des merveilles…
Nous devons donc être particulièrement attentifs à ne pas prononcer
des paroles négatives qui pourraient déclencher instantanément le pouvoir
de Satan (Ketouvot 8b). Cela dit, on peut comprendre plus aisément
le passage de la Guemara cité par Rachi au sujet du verset
« Les yeux de Léa étaient faibles »
(Berechit
29 : 17).
Rachi explique que Léa passa de longs jours à pleurer parce qu’elle
était convaincue qu’elle devait épouser Esaü; la rumeur disait,
considérant que Isaac avait deux fils et Lavan deux filles,
l’aîné Esaü devait épouser la fille aînée Léa et Yaacov
devait épouser Rachel… et Léa était très troublée par cette
rumeur insistante et elle pleurait sans cesse espérant contrecarrer les
effets négatifs des paroles prononcées par la rumeur publique.
Dans la section Quedochim, la Torah nous met en garde «
N’injurie
pas le sourd » (Yayikra 19 : 14) et, par ailleurs,ilest
dit (Chemot 22 :27)
« N’outrage point l’Autorité Suprême
et ne maudis pas le chef de ton peuple ».
Bien que nous ne connaissions pas la force véritable d’une malédiction
et de ses effets à l’égard d’une personne, nous savons que, même
si l’outrage provient d’un « Am Haaretz »
(une personne ordinaire), elle peut avoir un effet dévastateur…
A fortiori, plus la personne est considérée et plus fort est l’impact
de ses mots… Les mots d’un Juste deviennent réalité, même s’ils
ne sont pas l’expression de sa pensée profonde. Au sujet des Tsadikim,
Dieu dit : « J’ai mis Mes mots dans votre
bouche… pour créer les fondations de la Terre… » (Isaïe
51 : 16).
Celui qui est prudent dans ses paroles préserve la force des mots
et peut se servir de ce pouvoir pour aider son prochain, simplement, en
lui souhaitant du bien, avec des paroles simples (Rav Elhanan Wasserman).
Un jour, le Rav Yossef Haïm Zonenfeld surprit un de ses proches
qui maudissait un hérétique très connu à
Jérusalem… Le Rav
s’interposa et dit à cet homme qu’il n’avait pas le droit de dire
du mal de quiconque du fait que l’Eternel est extrêmement miséricordieux
et qu’Il pourrait avoir pitié de cet individu… « Je
ne serais pas déçu d’apprendre que Dieu a eu de la compassion pour
cet homme et qu’Il lui a accordé la Vie éternelle »,
dit-il. « Il est vrai qu’il ne convient
pas d’ériger la conduite de cet homme en exemple car il pourrait avoir
une mauvaise influence sur les autres, mais il ne convient absolument pas
de l’injurier ni de tenter de lui nuire » (Izaharou
Bichvod Haverim).
Pinhas
Prier pour son prochain
« Pinhas, fils de Eléazar, fils d’Aaron
le Prêtre, a détourné la fureur des enfants d’Israël… et je ne
les ai point affligés de ma colère » (Bamidbar 26 :11).
La Guemara (Sanhedrin 82b) nous dit que, dès que Pinhas tua
Zimri, toute sa tribu tenta d’éliminer Pinhas… Alors, Dieu
envoya un ange pour les attaquer et faire diversion… Voyant que plusieurs
de ses agresseurs mouraient, Pinhas se mit à prier pour eux et l’effusion
de sang s’arrêta (Ps. 106 : 30).
Pinhas s’adressa à Dieu :
« Maître du Monde, faut-il que 24000
hommes meurent à cause de quelques pécheurs ? »
Les enseignements de cette Guemara nous indiquent combien il est primordial
de prier pour son prochain… Ces hommes pour qui Pinhas pria voulaient
le tuer et furent exécutés justement pour éviter sa mort… Et cependant,
dans sa grandeur d’âme, Pinhas ne supporta pas de les voir mourir l’un
après l’autre et, c’est pourquoi, il supplia Dieu
« d’arrêter le massacre. »
L’amour de Pinhas pour son prochain était tel qu’il ne supportait
pas de voir des gens souffrir, même si cela devait lui porter préjudice.
A plus forte raison, nous devons prier pour notre prochain qui ne nous
veut aucun mal et qui a sûrement besoin de notre aide !
Rabenou Yona écrit qu’un Juif doit prier tous les jours pour
la guérison de tous ses frères malades et aussi pour les gens bien-portants
afin qu’ils ne tombent pas malades; il doit également prier pour que
le peuple soit épargné de toutes sortes de maux et que l’Eternel le
sauve de tout le mal qui pourrait lui être causé par les nations, par
la pauvreté ou par les catastrophes naturelles.
Il convient également de prier pour que les douleurs de l’accouchement
soient supportables et que ceux qui subissent une mauvaise influence reviennent
à la crainte et à l’amour de l’Eternel; pour ceux qui n’ont pas
d’enfant, qu’ils en aient de bons et pour ceux qui en ont déjà, qu’ils
les élèvent dans l’amour de Dieu, qui protège Son Peuple, afin qu’Il
rétablisse Son Nom, rapidement et de nos jours (Sefer Hayirah p. 184).
Et toutes ces prières se feront avec ferveur ! En effet, plus il y
a concentration et ferveur et plus nombreuses seront les chances que la
prière soit exaucée. La Guemara nous donne, à ce sujet, l’exemple
de deux personnes qui avaient été amenées à la potence; leurs sentences
étaient identiques mais l’un s’en revint chez lui, alors que l’autre
fut pendu !
Et pourquoi cette différence de traitement ? demande la Guemara…
Pour la simple raison que les prières de l’un furent acceptées parce
qu’elles étaient profondément sincères, alors que celles de l’autre
manquaient de ferveur (Roch Hachana 18a).
Le Rav Shalom Zalman Auerbach raconte cette histoire au sujet
de son père, Rabbi Haïm Leib.
« Une dame rendit visite à mon père, tard dans la nuit, pleurant
et se plaignant que sa fille souffrait terriblement pendant son accouchement…
Le médecin craignait pour la vie de la mère et de l’enfant et prétendait
que, s’il ne pratiquait pas immédiatement une césarienne, la situation
ne pouvait qu’empirer. « Je vous en prie,
monsieur le Rabbin, priez pour ma fille et son bébé ».
Mon père commença par consoler la dame et lui affirma que tout irait
bien et que le médecin n’avait pas à pratiquer de césarienne « Ayez
confiance en Dieu et votre fille et son bébé se porteront bien, je puis
vous l’assurer ». La dame s’en fut rapidement à la
clinique et s’empressa de dire au médecin qu’il ne fallait absolument
pas pratiquer de césarienne !
Mais, dès qu’elle fut partie, mon père regretta ce qu’il
venait de dire. Sa première réaction fut de calmer et de réconforter
la dame, mais maintenant il se demandait «
Comment
ai-je pu m’avancer autant, alors que les médecins ont considéré que
la vie de la jeune maman était en danger ? Je n’ai pas évalué l’importance
des risques
». Et mon père tenta de rattraper la dame
pour lui dire de se conformer aux instructions des médecins, mais il ne
put la retrouver.
Mon père revint à la maison, consterné, se faisant un souci d’encre
pour la jeune maman en couches… Alors, il demanda instamment à toute
la famille de rester éveillée toute la nuit pour faire des prières,
pour lire des psaumes… Je n’avais jamais vu mon père aussi troublé
que cette nuit-là… Il pleura toute la nuit, priant pour la bonne délivrance
de la jeune femme…
Le lendemain, la dame revint avec des larmes de joie et s’écria
« Merci, Rabbi » en sanglotant.
« Merci pour vos bénédictions et vos encouragements.
Ma fille a donné naissance à un superbe bébé et tout le monde se porte
bien ! »
(Rapporté par un étudiant du Rav Shalom Zalman).
Balak
Les dangers du mauvais
œil
« Bilaam leva les yeux et vit Israël
camper selon ses tribus.
Et l’Esprit de Dieu fut sur lui » (Bamidbar
24 : 2).
Rachi explique qu’en fixant de son regard les habitations des enfants
d’Israël, l’intention de Bilaam était de leur jeter le mauvais oeil
! Il fait également remarquer que les trois traits dominants de son caractère
– le mauvais oeil, l’orgueil et l’ambition démesurée
(Maximes
des Pères 5 :19) – ressort de nombreux versets de la Bible :
«
Allez dans votre pays, car l’Eternel refuse de me laisser aller avec
vous, dit-il aux chefs de Balak » (Bamidbar 22 : 13), dénote
son orgueil alors que son ambition maladive ressort du verset
(Bamidbar 22 :18) : « Quand Balak me donnerait sa maison pleine d’argent
et d’or… »
Aussi, Bilaam fut-il très désappointé de voir que les enfants d’Israël
campaient « selon leurs tribus » et que leurs tentes étaient ainsi disposées
que personne ne pouvait voir à l’intérieur de la tente de son voisin.
Et c’est grâce à ce sens de la pudeur des enfants d’Israël que
Bilaam fut dans l’impossibilité, malgré sa ferme volonté, de les maudire;
il ne put, en fait, que leur adresser des paroles de bénédictions ! Ceci
nous enseigne, dit la Guemara (Baba Batra 60a) que tout un chacun doit
s’assurer que ses fenêtres ne donnent pas directement sur celles de
son
voisin !
Il est également vivement recommandé « de
ne pas considérer avec envie la maison de son prochain car cela pourrait
entraîner sa perte » dit le Hazon Ich.
De même, est-il conseillé de prendre toutes précautions pour ne pas
se faire du mauvais oeil à soi-même.
En vue de minimiser les effets du mauvais oeil, nos Sages ont institué
des lignes de conduite spécifiques. Par exemple, la Guemara nous dit qu’il
n’est pas permis de se tenir dans le champ de son voisin à l’époque
de la moisson, car cela pourrait engendrer le mauvais oeil et entraîner
des conséquences dommageables sur la maturité des céréales !
En fait, le Aroukh Hachoulhan stipule que celui qui endommage
la propriété d’autrui par « mauvais oeil » sera pénalisé par les
Tribunaux Célestes !
Un autre exemple de la vigilance que nous nous devons d’avoir concerne
le fait de s’interdire de compter les gens directement. Lorsque les gens
sont comptés –ou même observés de trop près– cela risque fortement
d’attirer le mauvais oeil.
La Guemara enseigne que, si une personne gagne une fortune
ou bénéficie d’un gros héritage, ou même s’il épouse une jeune
fille riche, il se devra de faire une très grande mitsva avec son argent
pour détourner le mauvais oeil (Eruvin 64b).
Les effets du mauvais oeil sont mentionnés à plusieurs reprises dans
la Guemara. Parfois, nos Sages pouvaient punir des malfaiteurs… en les
scrutant du regard, ce qui, selon la situation, pouvait soit provoquer
leur mort, soit engendrer chez eux un état de pauvreté manifeste !…
Rav Chechet fixa du regard, un jour, un hérétique qui le contredisait
et ce qui resta de cet homme après n’était rien d’autre qu’un «
tas d’ossements » (Berakhot 58a).
Rabbi Yohanan Ebschitz situe cette même idée dans le verset
«
Moïse entendit et se jeta à terre » qui décrit sa réaction
à la suite de la rébellion de Korah; en entendant les accusations malveillantes
de celui-ci, Moïse évita de le regarder en face, de crainte de lui infliger
une punition fatale, et c’est pourquoi il préféra se jeter à terre
(Tipheret Jonathan).
La force du mauvais oeil est incontrôlable et nous devons être
conscients que la manière dont nous regardons
« l’autre » peut avoir un effet dévastateur. Il convient donc
de s’habituer à ne pas s’intéresser de trop près aux attitudes et
aux biens des autres pour leur éviter tout dommage.
On dit que, lorsque le Rav Joseph Haïm Zonnenfeld marchait dans
les rues de la vieille ville de Jérusalem, il empruntait toujours des
petits chemins mal pavés… Quand on lui demandait pourquoi il ne marchait
pas sur les trottoirs qui étaient bien entretenus et plus confortables,
il répondait qu’il préférait ne pas marcher trop près des fenêtres
des maisons « J’ai toujours fait très attention
de ne pas regarder dans les maisons de mon prochain, je préfère circuler
de l’autre côté de la rue, bien que la chaussée soit plus tortueuse…
(Haïch Hahoma).
Houkat
L’amour de la Paix
« … Toute la Maison d’Israël pleura
Aaron 30 jours … » (Bamidbar 20 : 29).
Le verset précise « toute la Maison d’Israël » - hommes
et femmes – pleura Aaron le Prêtre.
Or lorsque Moïse mourut, il ne fut pleuré que par les hommes
« Les Enfants d’Israël pleurèrent Moïse » (Devarim 34 :8).
Rachi explique que Aaron était un homme qui aimait la paix et qui la
recherchait sans cesse pour susciter la réconciliation entre des adversaires
et surtout entre maris et femmes.
Hommes et femmes appréciaient les efforts d’Aaron pour ramener la
paix en toutes occasions et il fut une grande perte pour tous (bien que
Moïse fut sûrement aussi grand que son frère et avait une immense influence
sur le peuple, il n’était pas impliqué dans les problèmes quotidiens
des enfants d’Israël).
La faculté d’Aaron d’encourager et de susciter la paix et l’harmonie
partout où il se trouvait était assurément sa plus grande qualité…
Il saluait tout un chacun avec chaleur et ne manquait jamais de répondre
avec empressement au salut de son prochain…
Le décrivant, Hakadoch Baroukh Hou dit : «
En paix et avec droiture il a cheminé à Mes côtés et beaucoup, par
sa grâce, ont abandonné l’iniquité » (Malachie 2 : 6).
Lorsque Aaron décelait un sentiment d’animosité entre deux personnes,
il les approchait et s’adressait à chacun d’eux
« Pourquoi lui en veux-tu ?
» et il tentait toujours de résoudre leurs dissensions (Derekh Eretz
Zouta 9).
Hillel disait « Sois parmi les
disciples de Aaron, aime la paix et recherche-la, aime les gens et rapproche-les
de la Torah » (Avot 1 : 12).
Les commentateurs expliquent que celui qui ramène la paix ne devient
pas automatiquement un disciple de Aaron. Si une personne essaie de maintenir
avec son prochain des relations harmonieuses en essayant d’ignorer les
défauts respectifs de chacun, alors il n’accomplira qu’une paix très
superficielle.
Mais pour devenir un authentique disciple d’Aaron et générer une
paix véritable, il convient de rapprocher son prochain de Dieu et ainsi
que le disait Rav Hanina « Les étudiants
de Torah permettent d’augmenter la paix dans le monde
».
Le Rabbi de Gour décida un jour de rendre une «
visite de
réconciliation » à un certain Rav dans l’espoir que sa visite
puisse l’aider à créer une meilleure atmosphère au sein de sa communauté
agitée par des conflits divers.
Ses disciples tentèrent de l’en dissuader prétextant que le voyage
serait long et qu’ils devraient parcourir de nombreux sentiers boueux…
Le Rabbi n’entendit pas renoncer à son projet « Pour
l’amour de la paix, je suis disposé à marcher sur des chemins de boue
dix fois s’il le faut » dit-il… Le Rabbi de Gour et
ses disciples s’en furent finalement chez le Rav et leur visite fut couronnée
de succès… (Roch Ariel).
Qorah
Eviter la
controverse
« Qorah, fils de Ytshar… fils de Levi
prit parti… » (Bamidbar 16 : 1).
Rachi : Qorah prit le parti de s’écarter de la communauté pour contester
la validité de la hiérarchie que Moïse avait institué.
Qorah accusa Moïse et Aaron de s’attribuer pouvoirs et prestige
à des fins personnelles… Il prétendait que le concept de
Kehouna
(Prêtrise) n’était pas d’origine divine mais une pure création
de Moïse; il tenta ainsi de semer le doute au sein du peuple afin qu’il
le rejoigne dans sa lutte… et pour prix de cette rébellion il fut puni
d’une mort tragique, lui et tous ceux qui l’avaient suivi. Ceci nous
enseigne combien est lourde et sévère la sanction encourue par les adeptes
de la division du peuple .
Le Midrach précise que l’incitation à la haine et la discorde au
sein du peuple juif est une faute si grave que Hachem a effacé le souvenir
de toutes les personnes impliquées dans la rébellion de Qorah, comme
il est dit : « Un feu s’élança de devant
Hachem et consuma les 250 hommes… » (Bamidbar 16 : 35).
Rav Brachia dit que l’incitation à la division est si épouvantable
que même les jeunes enfants innocents des parents qui prirent part à
la rébellion furent engloutis lorsque la terre s’ouvrit (Midrach
Rabba 18 :4).
Immédiatement après la mésaventure de Qorah, la Torah édicte un
commandement négatif : « Il ne devra pas
se comporter comme Qorah et ses factieux » (Bamidbar 17 : 5).
Selon Maïmonide, ce verset renforce l’interdiction de s’insurger
contre le principe de la Kehouna; il est en effet interdit à un non-Cohen
de dire « Pourquoi ne servirais-je pas au
Temple comme tous les prêtres ? »
Nos Sages ont étendu le sens de cette interdiction en y incluant toutes
sortes d’allégations qui pourraient être dirigées à l’encontre
d’une personne – ou d’un groupe de personnes- qui s’est vue attribuer
un honneur ou une fonction de dirigeant par Hachem, car Lui Seul est Maître
de Sa décision.
Rabbi Ben Tsion Abba Shaoul, dans son ouvrage Or Letsion,
précise qu’il convient d’être extrêmement prudent dans ses propos,
afin que son opinion personnelle ne provoque pas une controverse « La
gravité de la dissension est telle que nous devons faire tous les efforts
nécessaires pour maintenir la paix dans notre camp ».
Il raconte qu’un jour, alors que deux rabbins se trouvaient en désaccord
sur l’interprétation d’une halakha, un homme lui demanda son opinion
sur la question…
Le Rav sentit que cet homme souhaitait envenimer le débat, aussi lui
répondit-il : « Il y a des différences d’opinion…
Vous pouvez choisir de vous ranger à l’avis de l’un ou l’autre des
rabbins, mais sachez qu’il n’existe pas une autorité religieuse au
monde qui accepterait d’exacerber la dissension… au sein du peuple
juif ».
L’assistant du Rav Itshak de Vorke raconte qu’un jour il
accompagna son Maître à l’occasion d’une visite à Varsovie. Un soir,
après une longue journée de rendez-vous, le Rav Itshak s’en revint
à son hôtel et trouva sa porte enfoncée… Quelqu’un avait écrit
sur cette porte des remarques désobligeantes à son sujet…
L’assistant du Rav fut très choqué… « Ne te formalise pas »
dit le Rav à son assistant. « Mon Maître m’a enseigné de ne pas se
laisser troubler par les gens qui incitent à la haine. En général, de
telles accusations concernent justement des principes auxquels celui qui
est accusé est le plus attaché…
Regarde Qorah, par exemple, il a accusé Moïse et Aaron de s’approprier
injustement tous les honneurs alors que la Torah nous enseigne que «
Moïse était humble, très humble, plus que toute personne sur la face
de la terre » (Sipourei Hassidim).
Chelah Lekha
Gardons
nous de la calomnie
« … et dans le désert, ils M’ont
mis à l’épreuve dix fois et n’ont pas obéi à Ma Voix… » (Bamidbar
14 : 22).
Après que Moïse ait imploré l’Eternel de ne pas tenir rigueur au
peuple pour sa défiance constante à son égard, Dieu leur pardonna certes,
mais cependant Il décréta que le peuple juif devait errer pendant 40
ans dans le désert.
Pour sa part, la Guemara considère que c’est la dernière provocation
qui avait entraîné cette terrible sanction…
Si ce n’avait été le péché de médisance – et notamment les
rapports insidieux des explorateurs (Méraglim) sur la terre d’Israël
– le peuple juif n’aurait pas été condamné à subir 40 années d’errance…
« Viens et regarde la sévérité de la
peine encourue par la calomnie » continue la Guemara «
Si parler négativement au sujet des arbres
et des pierres peut provoquer une telle sanction, combien pire est-il de
calomnier un être humain » (Archin 15a).
La gravité du dénigrement de son prochain a été souvent soulignée
par nos Sages et on retrouve cette notion dans le passage de la Torah qui
traite de la diffamation à l’égard d’une femme mariée.
Selon la Halakha, une jeune femme qui reçoit des kidouchim, même
si elle est encore mineure, est considérée comme mariée, quand bien
même le mariage n’a pas encore été célébré.
Si le mari accuse sa nouvelle femme de conduite douteuse pendant les
fiançailles, il doit se présenter devant le Beth-Din avec deux témoins
pour étayer ses accusations… Si celles-ci ne sont pas fondées, il sera
condamné à payer des dommages et intérêts de 100 Shekels-Argent au
père de la jeune fille parce qu’il a émis une accusation calomnieuse
à l’égard d’une vierge d’Israël; il devra l’épouser et ne pourra
jamais la répudier (Ki Tetsé 22 : 19).
De même, nos Sages précisent que celui qui porte une accusation mensongère
ou crée un doute à l’égard de la légitimité d’une famille juive,
ne peut jamais être pardonné; bien que les membres de cette famille puissent
pardonner, cela reste insuffisant du fait que le calomniateur a porté
atteinte à l’honneur et à la considération des générations futures
(Shaarei Techouva 3 : 111).
La calomnie à l’égard d’un être humain, et surtout en public,
peut être assimilée à un crime, mais pourquoi le rapport négatif des
explorateurs mérite-t-il une punition aussi grave alors qu’ils n’ont
médit que sur des arbres et des pierres ?
Les commentateurs expliquent que la calomnie engendre deux violations
distinctes; en plus des effets négatifs subis par la victime, elle implique
également une grave atteinte au respect dû à Hakadoch Baroukh Hou, et
plus particulièrement lorsqu’il s’agit de la terre d’Israël.
Les Meraglim furent coupables de calomnies à l’encontre de la terre
que Dieu avait sanctifiée plus que toute autre pour la donner à Son Peuple
et, c’est pourquoi, la sanction de 40 années d’errance dans le désert
fut décrétée à l’égard de tout le peuple.
La leçon importante à tirer de ces événements est que les juifs
se doivent d’être excessivement prudents dans leurs jugements à l’égard
de la Terre d’Israël car, en effet, il est dangereux de s’en prendre
à la terre que Dieu a choisie comme résidence du Peuple d’Israël.
La Guemara nous raconte combien nos Sages se sont toujours attachés à
ne développer que des sentiments positifs à l’égard d’Eretz Israël
(Ketouvot 112b).
Il peut s’avérer parfois difficile de toujours louer la Terre d’Israël
mais nous devons constamment avoir en mémoire que c’est la Terre choisie
par l’Eternel, que c’est l’endroit où la Providence divine est la
plus forte et, comme disent nos Sages, où l’air que l’on respire peut
à lui seul aider une personne à devenir sage…
Behahalotekha
Surmonter
son orgeuil
« Et l’homme Moïse était très humble,
plus que toute autre personne » (Bamidbar 12 :3).
Pourquoi la Torah choisit-elle de parler de l’humilité de Moïse
juste après que son frère Aaron et sa soeur Myriam l’aient critiqué
pour le choix de son épouse ?
Maïmonide explique que, malgré cette remontrance, Moïse ne
réagit pas; il préfèra éviter une querelle et essayer plutôt d’expliquer
son attitude et tenter de convaincre son frère et sa soeur qu’il n’avait
pas agi de manière légère ou inconséquente .
L’Eternel apprécia vivement cette qualité exceptionnelle de Moïse
et il déclara au monde que « Moïse était
très humble » justement après cet événement.
Maïmonide rapporte qu’il fut même critiqué « vertement » par
ses proches, et que, malgré cela, il ne réagit pas.
Nous tirons de là que le silence est essentiel, face à l’agression
physique ou verbale aux yeux de l’Eternel.
Le Hafetz Haïm affirme que lorsqu’une personne surmonte son
orgueil et se retient de réagir à une insulte, Dieu l’élève dans
ce monde et dans le Monde à Venir.
Quand Shimi Ben Guerra insulta le Roi David, et le traita grossièrement,
David interdit à ses serviteurs de réagir à son encontre
(Samuel
II 16 : 5). Il leur expliqua que c’était manifestement
la Volonté de l’Eternel qu’il soit ainsi humilié, Shimi Ben Guerra
n’étant qu’un envoyé du Ciel.
Nos Sages nous disent que, comme récompense de sa retenue, le Roi
David reçut l’honneur d’être le quatrième à conduire la Merkava
(Le Char Céleste).
Pour décrire les bonnes âmes qui ont su ne pas réagir à des agressions,
la Guemara (Chabat 88b) cite le verset suivant «
Fasse en sorte que ceux qui L’aiment soient semblables au puissant soleil
levant »
(Devarim/Choftim).
Nos Sages expliquent que la relation entre ceux qui vénèrent l’Eternel
et le soleil est ainsi faite pour décrire comment le soleil devint si
puissant.
A l’époque de la Création, la lune se plaignit de l’importance
donnée au soleil prétendant que « deux puissances
ne pouvaient régner simultanément »… le soleil aurait
pu développer les mêmes arguments à son profit ! Mais il se tint muet
et fut récompensé pour son silence. Il devint ainsi l’astre le plus
important, alors que la taille de la lune fut réduite…
Aussi, la Guemara affirme-t-elle que ceux qui sont injuriés et demeurent
silencieux s’élèveront comme « le puissant soleil levant ».
Le Kli Yakar, pour sa part, commente les mots de la Guemara (Baba
Batra 75a) : « La face de Moïse rayonnait
comme le soleil et celle de Josué comme la lune. Comme
le soleil, la grandeur de Moïse, dans son silence, était double. Quand
il fut critiqué par ses proches, il ne réagit pas et il ne tenta pas
de s’arroger un privilège. Mais quand Josué rapporta à Moïse les
paroles de Eldad et Medad (qui médisaient à l’égard de Moïse) la
seule réaction de Moïse fut de dire : « Si
tout le peuple de Dieu pouvait prophétiser ». Aussi, Moïse
mérita-t-il de briller comme le soleil alors que Josué fut comparé à
la lune. »
Un adversaire du grand Rav Shmouel Shmelke de Nikolsbourg décida
un jour de l’humilier publiquement ! La veille de Yom Kippour, l’homme
versa une sérieuse dose de whisky dans le verre d’eau que le Rav s’apprêtait
à boire avant le jeûne… et il attendait avec impatience de voir le
résultat ! Mais, à sa grande consternation, le Rav Shmelke ne donnait
absolument pas l’impression d’être sous l’effet de la boisson et
resta plongé dans son étude. Et l’homme entendit le Rav murmurer les
mots du verset « Je saurai ainsi que Tu m’aimes,
car mon ennemi ne triomphera pas de moi » (Psaume 41 : 12).
L’homme fut pris de remords et courut demander pardon au Rav… «
Il
n’y a rien à pardonner, lui dit le Rav, même si je m’étais enivré
et que j’avais parcouru, titubant, les rues de la ville, vous m’auriez
rendu un grand service. Je suis un grand pécheur et la honte que j’aurais
eue alors m’aurait nettoyé, au moins à un certain degré, de mes péchés.
Dans ce cas, je vous aurais été redevable et n’aurais pas été en
mesure de vous pardonner… » (Hassidim Messaperim).
Nasso
L’harmonie conjugale
« … Le Cohen écrira ces malédictions
sur un bulletin et les effacera dans les eaux amères … » (Bamidbar
5 : 23).
La procédure prescrite pour tester une femme soupçonnée d’adultère
consiste pour le Cohen à écrire une série de malédictions incluant
le nom de Dieu et à dissoudre les mots dans « les eaux amères ».
Si après avoir bu, la dame reste intacte alors, elle rejoindra son
mari, lavée de tout soupçon. L’harmonie conjugale est si importante,
dit le Midrash, que Hachem accepte que Son Nom soit effacé pour permettre
de ramener une épouse à son mari (Midrash Rabba 11).
Le Maharal de Prague suggère que si Hakadoch Baroukh Hou
permet cet effacement pour ramener la paix entre les époux c’est parce
que la Chekhina (Présence divine) réside dans une union pacifique
et l’effacement du Nom écrit se justifie lorsqu’il permet à la Chekhina
de revenir s’installer parmi eux.
L’harmonie entre juifs est si importante que la mitsva de ramener
la paix entre une personne et son prochain est une des rares Mitsvot où
l’on est récompensé d’abord dans ce monde, la récompense principale
étant réservée pour le monde à venir(Pea 1 : 1).
Il est intéressant, à ce sujet, d’examiner la structure des mots
Ich (homme) et Icha (femme). Ces deux mots se prononcent presque de la
même manière, sauf que Ich s’écrit avec un Youd et Icha se termine
par un Hé; ces deux lettres Youd et Hé signifient le nom de Hachem. Ceci
nous enseigne que lorsqu’un homme et une femme vivent en harmonie, la
Présence divine réside parmi eux… Mais, si leur relation est émaillée
de conflits, les deux lettres représentant le Nom disparaissent et il
ne reste plus que AICH (? + ?) c’est-à-dire le feu ! !
Faire l’effort de ramener la paix dans un foyer est si important
que nos Sages considèrent que, ce faisant, on aide à l’instauration
de la paix dans le peuple juif… à l’inverse, celui qui crée des conflits
dans son ménage est considéré comme s’il détruisait l’harmonie
du peuple tout entier.
Nos Maîtres se sont penchés à plusieurs reprises sur ce sujet et
ont constaté qu’en général une femme était toujours plus susceptible
et qu’il lui était souvent plus difficile de faire marche arrière.
Aussi, conseillent-ils instamment à l’homme de renoncer à
son amour-propre et, par respect pour son Créateur, de faire tout ce qui
est en son pouvoir pour ramener la paix dans son foyer (Pele Yoetz).
Le Rav Aryeh Levin rentrait chez lui un vendredi après-midi
lorsqu’il entendit des éclats de voix chez ses voisins immédiats…
Il entendit, notamment, la femme reprocher à son mari de ne pas lui avoir
donné suffisamment d’argent pour préparer le Chabat et, qu’en conséquence,
elle ne cuisinerait pas…
Moins d’une heure après, le couple fut surpris de recevoir la livraison
d’un grand carton contenant une quantité importante de victuailles.
De quoi s’agit-il ? demanda le couple au livreur. «
Mon patron m’a dit de vous apporter ce carton et de vous dire que cela
a été payé par un Monsieur du voisinage… ». Après
la prière du soir, le Rav Levin s’en alla souhaiter Chabat Chalom à
ses voisins qui lui firent part de leur grande surprise… « Nous
ne savons absolument pas qui nous a adressé toute cette nourriture »
dirent-ils au Rav qui se dit également très étonné…
« Au fait, j’ai préparé un superbe dîner
de Chabat, pourquoi ne pas vous joindre à nous ? » demanda
la dame au Rav Levin qui accepta de rester quelques instants avec le couple…
Il leur dit, avec beaucoup d’émotion, combien il était heureux que
l’Eternel leur ait dispensé ses faveurs en cette veille de Chabat (Un
Tsadik de notre temps).
Bamidbar
Rapprocher ses frères
de la Torah
« Fais approcher la tribu de Levi
» (Bamidbar 3 : 6).
Pour décrire la particularité de la tribu de Levi, le Midrach cite
le verset (Psaume 92 : 13) : « Les Justes
croissent comme le palmier, ils s’élèvent comme les cèdres du Liban
».
Le Baal Chem Tov explique qu’il y a deux sortes de Justes.
L’un est comparé au cèdre qui s’élève très haut dans le ciel,
mais ne donne pas de fruits; ce juste pousse très haut, certes, mais n’a
que très peu – voire pas du tout – d’influence sur son entourage.
Il est cependant un autre type de Sage qui est comparable au palmier;
quand il grandit, il est porteur de fruits et sa droiture a un effet immédiat
auprès des autres, car il leur révèle la beauté de la Torah. La tribu
de Levi, dit le Midrach, possède ces deux qualités : elle s’élance
vers les hauteurs et elle influence favorablement son entourage.
On retrouve dans la Torah une autre allusion aux arbres pour définir
les Justes « Y a-t-il des arbres ou non ? » questionnait-on à
propos de la Terre d’Israël du temps des explorateurs. Rachi explique
que c’est une allusion aux sages et que la question signifiait «
Y a-t-il des Justes dans le Pays dont le mérite pourra protéger le peuple
? »
La question reste entière : si Moïse voulait que les explorateurs
recherchent les justes, pourquoi les a-t-il envoyés dans les rues –
par analogie aux arbres – plutôt que dans les maisons ou dans les maisons
d’études ? Peut-être parce que Moïse cherchait les Justes dont l’influence
pouvait s’exercer dans les rues. Les explorateurs devaient, en quelque
sorte, chercher
« les palmiers » les justes dont la présence
pouvait être ressentie dans l’atmosphère de la ville (Iture Torah).
Lorsqu’on se donne pour objectif d’inciter ses frères à se rapprocher
de la Torah, nous nous devons d’être attentifs à ne pas provoquer l’effet
contraire ! Une question intéressante fut posée au Rav Haïm Ozer
Grodzinski, de Vilna, par son beau-frère, le Rav Isaac Kosovsky
de Johannesbourg, illustrant combien les dirigeants se devaient être
prudents quand ils étaient en contact avec des gens éloignés de la Torah.
Le Rav Isaac indiquait que, dans sa Communauté, il y avait plusieurs
Cohanim qui profanaient publiquement le Chabat (pas par rébellion, mais
plutôt par manque de connaissances).
La question était de savoir s’il pouvait inviter ces Cohanim à bénir
l’assistance, alors que la profanation du Chabat peut être comparable
à de l’idolâtrie. Le Rav Haïm Ozer affirma qu’il ne fallait pas
interdire aux Cohanim de bénir l’assemblée; en effet, si on ne leur
permettait pas d’accomplir cette bénédiction, ils pourraient oublier
leur statut de Cohen et, par voie de conséquence, pourraient contracter
des mariages non autorisés, ils pourraient également se rendre impurs
en touchant un mort… aussi, était-il préférable de leur permettre,
malgré tout, de bénir l’assemblée, leur transgression n’étant que
le résultat de leur ignorance passagère.
Le Rav Nahum de Tchernobyl manifestait son affection à tout
juif, qu’il soit proche ou éloigné de la Tradition… Il ne vit jamais
« d’iniquité chez les descendants de Jacob
» mais s’adressait plutôt à tous comme s’ils étaient des Justes,
les honorant souvent au-delà de leurs mérites.
Rav Nahum expliqua son attitude en disant qu’il essayait d’imiter
les qualités (midot) de l’Eternel… Qui
est Bon aussi bien avec les Justes qu’avec les mécréants (Mi Mayanot
Hanetsah). |